Les blessures, infections et inflammations des pieds et des articulations sont fréquemment cause de réforme prématurée des truies. De plus, les animaux sujets à des inflammations ou à des infections de l’onglon ou des articulations souffrent. Ils se déplacent moins et restent plus longtemps en position couchée, ce qui se traduit par une prise alimentaire et un abreuvement moindres, et impacte défavorablement la performance zootechnique. La fertilité diminue, davantage de porcelets de poids insuffisant naissent, et le taux de remplissage baisse aussi. Les truies boiteuses génèrent également du travail supplémentaire à cause de leur atonie. Elles nécessitent des soins plus intensifs et plus fréquents.
Les problèmes sont habituellement déclenchés par la conception du sol et des aires de couchage dans la stalle de gestation, car le béton, utilisé habituellement dans cette partie du bâtiment, est source de difficultés spécifiques aux porcins.
L’onglon du porc est anatomiquement adapté pour la marche surtout sur un sol forestier, mou, élastique et antidérapant. Ainsi, conduire exclusivement les animaux sur des sols de ciment dur cause des problèmes de santé aux porcs compte-tenu de la nature de leurs onglons. Cependant, conduire les animaux durant plusieurs semaines sur des matériaux mous tels que la paille est également problématique, car les onglons ne sont pas usés et se déforment. Des problèmes similaires surviennent quand le sol du bâtiment d’élevage est humide en permanence, ce qui provoque un amollissement de la corne de la muraille de l’onglon, et la rend plus fragile.
A cause de l’importante augmentation des problèmes de pattes et d’onglons, ainsi que de l’obligation réglementaire de loger collectivement les truies gestantes à partir de 2013, l’usage de tapis caoutchouc en stalle de gestation est au centre des discussions depuis quelque temps. La surface souple et élastique de ce matériau satisfait les besoins des onglons des porcs et peut aider à améliorer les caillebotis bétons conventionnels.
L’utilisation de tapis caoutchouc dans des bâtiments porcins peu paillés devrait améliorer le confort et rendre les déplacements des animaux plus sûrs, ce qui se traduirait par une diminution des blessures et des pathologies des membres. Jusqu’à présent la durabilité des tapis posait problème, car ils n’étaient pas suffisamment résistants aux morsures, et les animaux fouissaient dans les tapis avec leur groin jusqu’à ce que le caoutchouc se déchire.
Comme les porcs passent environ 80% de leur temps couchés, la solution la plus évidente consiste à revêtir d'abord les aires de couchage de caoutchouc. Cela diminue la fréquence des blessures ouvertes au niveau de l’épaule, lésions qui surviennent principalement quand les truies ne sont pas en bonne condition physique. De plus, ces blessures guérissent plus rapidement sur le revêtement souple. Les tapis sont aussi très utiles en ce qui concerne la structuration fonctionnelle des box d’élevage, car les truies aiment se reposer sur les tapis souples.
Des études récentes étayent les effets positifs des tapis caoutchouc sur la santé des onglons et des membres des truies gestantes. Ces résultats ont été obtenus lors d’essais conduits par le Centre fédéral bavarois de recherches pour l’agriculture de Schwarzenau et le Centre d’enseignement et de recherche de Boxberg dans le Bade-Wurtemberg, en Allemagne. Les deux centres ont conduit des études pratiques dans différents types de bâtiments d’élevage, pendant plusieurs mois, en utilisant des tapis pleins ainsi que des tapis ajourés sur 15% de leur surface environ. Tous les tapis testés avaient été produits par Kraiburg. L’état des onglons des truies était évalué lors d’un examen initial à leur entrée dans le bâtiment, et la procédure d’évaluation était répétée 14 et 35 jours plus tard.
Au fil du séjour des animaux dans les stalles, l’utilisation des tapis caoutchouc a eu une influence positive sur différents critères. Par exemple l’essai de Boxberg a mis en évidence une réduction des lésions de la corne de la muraille. Seulement 5% des truies présentaient de petites fissures 35 jours après leur arrivée dans leurs nouveaux quartiers. Ce ratio est en fort contraste avec les 27% d’animaux affectés à leur arrivée. Dans le groupe témoin qui ne vivait pas sur des tapis caoutchouc 13% des truies avaient des petites fissures dans la muraille de l’onglon, contre 19% au 1er jour de l’essai, soit une rémission substantiellement bien moindre des lésions.
Des améliorations significatives sont également apparues en termes d’abrasion de la muraille externe de l’onglon. Le graphique 1 présenté ci-dessous illustre le fait que 14 jours après leur arrivée, seulement 20% des truies du groupe ‘’avec tapis’’ présentaient des abrasions, tandis que ce ratio s’élèvait à 50% pour les animaux du groupe ‘’sans tapis’’. Ce constat perdure 35 jours après leur arrivée. Là encore, une proportion significativement supérieure de truies souffrait d’abrasion dans le groupe témoin.
L’augmentation globale des abrasions jusqu’au 35ème jour de l’essai, quel que soit le type de sol, s’explique par le fait que les tapis étaient installés uniquement dans les aires de couchage. Cela signifie que les truies ont continué à se déplacer sur du caillebotis béton dans les couloirs et la zone d’alimentation, où elles se couchaient de temps à autre.
Les boiteries faisaient aussi partie des paramètres analysées au cours des études. Conclusion : quand les tapis caoutchouc étaient utilisés, le nombre de boiteries ou de truies avec des problèmes locomoteurs était drastiquement abaissé, et ce jusqu’au 35ème jour des essais. Tandis que dans le groupe qui ne disposait pas de tapis caoutchouc, le nombre de truies développant des problèmes de boiteries augmentait légèrement.
Les conclusions du Centre fédéral de recherche bavarois pour l’agriculture mette également en évidence l’avantage des tapis caoutchouc dans les salles de gestation. Durant la gestation des truies qui disposaient de tapis caoutchouc dans leur aire de repos, on a mesuré significativement moins de bursites tuméfiées et d’égratignures (voir graphique 2).
La différence de fréquence des blessures des membres est également significative. Les truies entretenues dans leurs anciens bâtiments équipés de caillebotis béton - surfaces dures et présentant des angles saillants - présentaient plus fréquemment des blessures à leurs extrémités à la fin de leur gestation (+9,5%). Par contraste, le nombre de blessures des truies conduites sur tapis caoutchouc régresse de 3%. Cette différence est statistiquement significative (voir graphique 3).
Ces résultats démontrent donc que l’installation de revêtements caoutchouc sur les aires de repos des stalles de gestations a des effets positifs sur la santé et le confort des animaux. Cependant, le manque de durabilité de ces matériaux avait jusqu’alors été un problème majeur. Les truies libres de leurs déplacements ne cessent de fouir dans les tapis caoutchouc avec leur groin et finissent par les déchirer. Ce problème apparait désormais résolu. La R&D a récemment mis au point des matelas avec une durée de vie compatible avec une utilisation dans des aires de repos expérimentales pour truies gestantes. Avec ces tapis, on n’observe plus ni signes de morsures pas plus qu'on ne constate de dommages sévères. Les tapis ont été améliorés en termes de composition : une couche anti-morsure a été ajoutée. Le fabricant a également renforcé les extrémités des tapis, avec des bordures en caoutchouc dur, et peaufiné le volet installation des tapis.
Protéger les tapis tout le long de la bordure à la jonction entre le sol bétonné et le caoutchouc a constitué une amélioration cruciale. La protection du rebord à l’extrémité de l’aire de repos est désormais assurée par un rail d’inox continu, profilé en L. En parallèle, d’autres tapis ont été seulement rivetés au sol à certains endroits le long de leur bordure. Ces tapis étaient maintenus par cinq boulons ancrés disposés sur une longueur de 1,20 mètre. Dans les deux cas de figure, les tapis sont restés en place même après plusieurs mois d’utilisation sur les aires de couchage. Aucun dommage majeur n’est visible.
Depuis 2013 les truies gestantes doivent être conduites en groupe, au plus tard quatre semaines après la saillie ou l’insémination et jusqu’à une semaine de la date prévue de mise-bas. Cependant des problèmes de pattes et d’onglons surviennent couramment durant cette période de conduite en groupe, car les onglons des porcs ne sont pas physiologiquement adaptés à la marche sur le béton dur pendant une longue durée. Des tests ont démontré que l’installation de tapis caoutchouc sur les aires de couchage des stalles de gestation peut contribuer à résoudre ce problème. L’utilisation de tapis de caoutchouc réduit le nombre de blessures de la corne et les lésions de la muraille externe de l’onglon. De plus il y a moins de cas de bursites et d’écorchures. Des progrès ont également été accomplis dans le domaine de la durabilité de ces équipements. Dans deux centres de recherche du Sud de l’Allemagne, des tapis améliorés résistent à l’irrépressible besoin des truies d’explorer leur environnement.